Permaculture - 02 - Planifier le paysage

Publié le par permaculture.over-blog.fr

 

2. PLANIFIER LE PAYSAGE

Si je pouvais avancer un seul critère pour distinguer la permaculture des autres systèmes d'agriculture, avec l'exception notable du concept de « keyline » (ligne-clé), c'est que la permaculture est avant tout un système d'agriculture consciemment planifié.

Les raisons principales pour planifier un système utilisant les végétaux sont les suivantes :

  • économiser notre énergie à l'intérieur du système ;

  • mobiliser les énergies pénétrant le système de l'extérieur (soleil, vent, feu) ;

  • arranger les plantes pour qu'elles s'aident mutuellement à vivre en bonne santé ;

  • disposer de façon optimale tous les éléments (plantes, terrassements et constructions, maisons) dans le paysage ;

  • s'adapter au climat et au site (plan spécifique) ;

  • y intégrer l'homme et la société ; économiser le combustible pour cuisiner et se chauffer ;

  • fournir à l'homme de quoi couvrir ses multiples besoins d'une façon réalisable par chacun.

En regardant autour de nous, nous ne trouvons guère de trace de planification réussie, que ce soit dans le paysage ou dans la conception de la plupart des habitations. Les personnes s'occupant de l'aménagement du territoire sont légion, mais où est le résultat de leur travail ? A part les plantations réalisées pour l'esthétique, pour faire joli, inspirées du mode contemplatif des jardins japonais classiques ou les perspectives contrôlées des jardins du Taj Mahal (réminiscents des entrées des résidences d'apparat anglaises ou américaines, artificielle et raides) où pouvons-nous trouver des critères de planification fonctionnelle ?

La répartition stricte des fonctions autour des établissements humains, que décrit Von Thunen dans son analyse des villages du nord de l'Europe à l'époque pré-industrielle, donne l'apparence d'avoir été planifiée, mais elle est en fait le résultat inconscient des limitations dues au système économique de cette communauté, basée sur le travail à pied et à cheval. De telles dispositions sont des modèles imposés aux gens et au paysage, non pas des plans conscients, choisis en fonction de leur intérêt pour la société et pour les économies d'énergie.

Les pelouses bien ordonnées conduisant au Taj Mahal sont entretenues par. un groupe de 20 à 30 veuves accroupies, munies de petits couteaux pour couper l'herbe. Elles sont forcées de faire ce travail dégradant pour maintenir un symbole d'une noblesse disparue, sur l'ordre de ceux qui admirent ce statut.

Le patient jardinier britannique remet sa mèche de cheveux en place et taille sans trêve les haies des nouveaux riches ; l'employé municipal ne soigne les parcs et les jardins de la ville que pour ce qu'ils représentent aux yeux du public.

Une telle orientation de la « planification » consiste à forcer la nature et le paysage à saluer la richesse et la force ; elle n'a pas d'autre but ni d'autre fonction.

La seule chose que démontrent de tels modes de planification, c'est que le pouvoir peut forcer les hommes, les femmes et les plantes à gaspiller leur énergie dans un labeur imposé, servile et sans intérêt, de même que le jardinier du dimanche tondant sa propre pelouse essaie de maintenir une pâle imitation de ce statut social élevé qu'il convoite. Mais dans ce cas, il est bien sûr le serf schizoïde en même temps que le seigneur féodal, poussant sa tondeuse, brandissant ses cisailles pour tailler la haie, déformant les rosiers et les troènes pour en faire des sujets d'ornement grotesques qui reflètent son éducation mesquine et frustrante.

Nos paysages et nos habitations sont le reflet exact de nos conceptions du monde et de nous-mêmes ; il est donc rare qu'ils fassent des concessions à des principes fonctionnels ou utilitaires. Le terrain entourant les églises et les écoles témoigne du même gaspillage insensé, ce qui maintient ceux qui y vont ou qui les dirigent dans la certitude que le statut social est tout, et que l'utilité n'a ni place ni signification dans ce monde.

L'une des histoires vécues que je préfère est celle d'un homme de Burnie, en Tasmanie, qui avait osé planter des choux sur sa « bande de nature » — le bout de terrain sacré et conventionnel qui se trouve devant chaque maison. Comme il avait fait ainsi la preuve de son manque de sens des convenances, la municipalité le rappela abruptement à l'ordre en envoyant des camions et du personnel pour arracher ses légumes (qui n'étaient que purement utilitaires et n'avaient donc aucune valeur esthétique). Je dois dire, pour être juste, que ceci se passait en 1977. En 1979, la municipalité de Burnie et d'autres villes alentour avaient commencé, à titre d'essai, à planter des arbres produisant fruits et graines oléagineuses dans leurs parcs publics.

Il est vrai que les exemples d'arbres donnant de l'ombre ne manquent pas, mais ce serait un arbre de bien peu de valeur, qui ne pourrait donner son ombre à l'homme et à la terre. Il est vrai aussi que la compréhension affinée de la nutrition végétale a entraîné le développement de la rotation des cultures.

Et l'agriculture intensive traditionnelle dans l'ouest, est un exemple de planification consciente dans l'espace et dans le temps, utilisant les plantes et les animaux en succession judicieuse pour ramener le sol à la santé. Dans son livre, King5 donne de nombreux exemples de ce que les peuples orientaux ont réalisé en matière d'agriculture permanente grâce à un travail intensif. Nombre d'entre eux font preuve d'ingéniosité en « empilant » les systèmes végétaux (cultures étagées) pour obtenir de meilleurs rendements sur le même terrain.

Mais un ouvrage récent de Fukuoka 3 va encore bien plus loin. Il dépasse celui de Phillips et Young4 qui dépendent d'applications massives d'herbicides (principalement le 2-4 D) et d'engrais pour réaliser la culture à large échelle de céréales et de légumineuses. Des signes de meilleures planifications utilisant « les plantes pour les plantes » existent. Il ne fait aucun doute qu'elles deviendront bientôt plus sophistiquées et seront plus largement utilisées, rien que pour des raisons économiques et sanitaires.

 

 

2.1La planification

2.2 Critères de planification

2.2.1 Décider des priorités

2.3 La planification des zones et des secteurs

2.3.1 Comment placer les éléments dans les zones

2.3.2 Comment placer les éléments dans les secteurs

2.4 Analyse à grande échelle du paysage

2.4.1 Utiliser la pente

2.5 Combien de terrain ?

2.6 L'« empilement » des végétaux

2.6.1 Établissement du système

2.7 L'interaction des plantes et des animaux

2.7.1 Les animaux

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